OPINION

LA COMMUNAUTÉ HAÏTIENNE, ALLIÉE DES QUÉBÉCOIS

ANDRÉ ARCELINMÉDECIN RETRAITÉ. EX-PRÉSIDENT DU CONSEIL ÉLU POUR LES HAÏTIENS DE MONTRÉAL (CÉPHAM)

Depuis l’arrivée des demandeurs d’asile haïtiens, l’on entend dans certaines émissions de radio et de télévision et sur les réseaux sociaux des voix qui stigmatisent notre communauté. Que l’on appuie ou que l’on critique la façon dont ils sont arrivés ici, le débat est ouvert. Cela ne doit pas susciter chez un certain nombre de Québécois la peur qui pourrait conduire à l’affrontement et à la division dans notre société.

Depuis la Révolution tranquille jusqu’à aujourd’hui, la communauté haïtienne a été celle qui s’est peut-être la mieux intégrée dans la communauté québécoise malgré les obstacles que certains veulent occulter.

Les faits sont là pour le prouver : dès les années 60-70, des professeurs haïtiens, dont Georges Anglade (un des fondateurs de l’Université du Québec à Montréal), Samuel Pierre (professeur en génie informatique-intelligence artificielle à Polytechnique), Chenest Pierre (Hydro-Québec) et Vely Leroy (économiste), allaient participer à l’éducation de nombreux Québécois éminents en sciences, en économie et en politique.

Gaby Jeanty (pharmacienne), des médecins dont la Dre Yvette Bonny (première greffe de la moelle), le Dr Gérard Blanchard (première greffe de la hanche et séparation de siamois), le Dr Jean-Claude Fouron (fondateur de l’unité cardiofœtale de l’hôpital Sainte-Justine), le Dr Nicolas Demers-Labrousse et le Dr Lacruz, professeurs à la faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke, le Dr Dominic Gattereau (gynécologue), le Dr Antoine Gattereau (endocrinologue) et bien d’autres de l’Association des médecins haïtiens à Montréal ont fait avancer la science médicale au Québec.

Dans les hôpitaux, les CHSLD, les CLSC, les infirmières, les infirmiers et les travailleurs sociaux compétents, dont le Dr Désiré et Benoit Oriol, spécialiste en vieillissement, ont travaillé à l’amélioration de notre système de santé.

Certains politiciens se sont évertués ces derniers mois à attiser la peur de nos aînés en affirmant que l’arrivée des demandeurs d’asile haïtiens allait leur enlever leur bain. Ces derniers, semble-t-il, n’ont peut-être jamais visité les CHSLD où les préposés haïtiens prodiguent avec passion des soins difficiles à un grand nombre de patients en perte d’autonomie.

Des personnalités politiques bien connues, Michaëlle Jean (ex-gouverneure générale du Canada), Vivian Barbot (députée du Bloc québécois), Jean Alfred (premier député noir du Parti québécois), Michel Adrien (maire de Mont-Laurier), Frantz Benjamin (président du Conseil municipal de Montréal), Emmanuel Dubourg (député fédéral), la Dre Meggie (sénatrice), Kettly Beauregard (ex-conseillère municipale à Montréal), Keder Hyppolite, Raymond Laurent, Régine Laurent (présidente du syndicat des infirmières), Dominique Anglade ex-ministre de l’Économie et ex vice-première ministre du Québec, ont joué un rôle important dans l’évolution politique, culturelle et économique du Québec.

Les chauffeurs de taxi haïtiens sont devenus presque indispensables dans le transport public à Montréal.

Les travailleurs agricoles haïtiens sont sollicités pour aller travailler dans les champs.

Nos peintres, Lionel Laurenceau, Lionel Jules, Emmanuel Pierre-Charles, Ena Joseph et bien d’autres, ont pu, à travers leurs œuvres, faire connaître le Québec à New York, Paris, Tokyo ou Londres.

Que dire de nos écrivains Dany Laferrière (seul membre québécois de l’Académie française), Anthony Phelps, de Rodney St-Éloi (Mémoire d’encrier), Stanley Péan, Émile Olivier, Alex Bernard, le Dr Joël Desrosiers, Franklin Midy, Charles David qui ont fait rayonner les lettres québécoises partout dans le monde ?

Nos personnalités du spectacle ont fait vibrer les Québécois. Eddie Toussaint, qui a pu faire découvrir les talents d’Anik Bissonnette et de Louis Robitaille (Ballets canadiens), Anthony Kavanagh, Didier Lucien, Herbie Moreau, Régine Chassagne (Arcade Fire), Mélanie Renaud, Fayolle Jean, Marie-Josée Lord, Varda Étienne, Martine St-Victor, Isabelle Racicot, Fabienne Colas.

Paul Dejean, Karl Lévesque, le Dr Ernst Gresseau, fondateurs de la Maison d’Haïti et du Bureau de la communauté chrétienne ont défendu avec vigueur les intérêts de la communauté.

Édouard Anglade, premier policier noir à Montréal, qui a pavé la voie à d’autres policiers noirs.

Nos sportifs médaillés dans plusieurs compétitions internationales : Jean Pascal, Joachim Alcine, Georges Laraque, Dudy Dorival, Yves Jabouin, Bruny Surin, Patrice Bernier, Adonis Stevenson, St-Juste.

Nos restaurants dont Méli-Mélo, Steve-Anna, Fourchette antillaise, Agrikol et bien d’autres, ont fait découvrir aux palais québécois les mets épicés des Caraïbes.

Et enfin, Jean-Ernest Pierre, fondateur et PDG de la première radio multiethnique francophone au Québec.

Cela n’a été qu’un bilan partiel de la présence de la communauté haïtienne au Québec, facteur positif de développement socio-économique.

La jeune génération d’origine haïtienne devrait être fière du travail accompli ici par ceux qui ont lutté pour un Québec plus ouvert, plus solidaire, plus inclusif et plus tolérant.

Les Haïtiens, alliés des Québécois, ont apporté ici leur savoir, leurs connaissances, leurs sourires, leur amour, leurs rayons de soleil antillais. Je suis sûr que la majorité des Québécois reconnaissent et apprécient l’apport de notre communauté à l’évolution du Québec.

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